Les heures rouges - Leni Zumas
Quand j’ai entendu parler
de Les Heures rouges de Leni Zumas, j’ai
tout de suite eu envie de le lire. Ni une, ni deux : je le commande à mon
libraire et m’y plonge immédiatement. Bien m’en a pris car ce roman a été un
coup de cœur fracassant !
L’AUTRICE
Leni Zumas est une
autrice américaine née en 1972 qui vit à Portland. Après un recueil de
nouvelles et un premier roman non traduit en français, Red Clocks a reçu des critiques élogieuses outre-Atlantique. Pour
cette rentrée littéraire, Les heures
rouges a paru chez les éditions Presses de la cité dans une traduction d’Anne
Rabinovitch.
LE LIVRE
Dans un futur très
proche, les Etats-Unis ont fait un retour dans le passé affolant :
avortement interdit dans tous les états, accord avec le Canada pour que les femmes
et jeunes filles voulant avoir recours à une telle intervention soient arrêtées
à la frontière, aide à la procréation médicalement assistée bientôt réservée
aux couples mariés…
Quatre femmes au destin croisé,
habitant dans la même ville, sont les victimes de cette société dans laquelle
le puritanisme revient au galop et où les femmes vivant en marge sont des sorcières.
LA CHRONIQUE
Les heures rouges est un livre qui fait
peur. Peur dans le sens où on aimerait que le sujet soit de la science-fiction
ou bien que l’histoire se déroule dans une époque révolue, appartenant au passé.
Sauf que non. Les droits des femmes ne sont pas acquis, qu’importe le pays. Et Les heures rouges nous rappelle exactement
cela.
Mattie est une jeune
fille qui se rend compte que ses règles ont du retard. Or, avec l’interdiction
de l’avortement, que faire ? Faire du tourisme médical ? Sortir un
cintre de sa garde-robe ? Oh tiens, les Irlandaises ne connaitraient pas
le même problème ?
Ro a une quarantaine d’années
et aime sa vie de célibataire. Mais Ro veut un enfant et faire un enfant seule
sera bientôt interdit. Idem pour l’adoption. Alors Ro dépense des fortunes en
aide à la procréation, sous l’œil à peine regardant de son gynécologue pour qui
elle n’est rien à part une femme perdue. Mais oh tiens, n’entendons pas enfin
la parole des femmes sur les violences gynécologiques ?
Gin est une guérisseuse qui
vit dans une cabane loin de l’agitation de la ville. Elle connait les plantes
et aide les femmes qui en ont besoin. Sauf que Gin est perçue comme une
marginale, ça passe mal aux yeux de certains. On la traite de sorcière et la
tient pour responsable du retour des algues. Oh tiens, ne brûlait-on pas les femmes accusées
de sorcellerie ?
Susan est une mère au foyer
aux pensées suicidaires, dépassée par son mari et ses enfants. Un ras-le-bol
qui s’explique par le fait qu’être mère au foyer, ce n’est pas ce à quoi elle
aspirait. Qui a envie de se faire engueuler par son mari parce qu’il y a trois
poils de cul sur la cuvette des toilettes ? Il peut pas le faire lui ? Mais oh tiens, les tâches
ménagères ne seraient-elles pas dévolues majoritairement aux femmes ?
Ces quatre femmes ne
sont pas des battantes, elles subissent. Elles ne se sont pas démenées contre la
rétrogradation de leurs droits, elles ne se soulèvent pas contre les remarques
misogynes. C’est là que je trouve le livre brillant, il me donne envie de me
battre pour des droits faiblards qui devraient être imprescriptibles.
Le style de l’autrice
est bien à elle. Le lecteur fait les rapprochements par lui-même. Elle ne fait
aucun jugement, aucun nom de politicien n’est cité mais la vraisemblance avec
un possible futur fait froid dans le dos.
Les heures rouges est un excellent roman
à mettre entre toutes les mains pour que chacun puisse se rendre compte que rien
n’est acquis, qu’il y a encore du chemin à parcourir et que c’est seulement par
l’action qu’on peut combattre les retours en arrière.
L’EXTRAIT
« Elle s'était réveillée un matin avec un président élu
pour qui elle n'avait pas voté. Cet homme estimait que les femmes qui faisaient
une fausse couche devaient payer l'enterrement des tissus fœtaux, et pensait
qu'un technicien de laboratoire qui lâchait accidentellement un embryon pendant
le transfert in vitro était coupable d'homicide involontaire. »
Je suis plus qu'intriguée. Dis-moi, concernant la construction, comment se mêlent les voix de ces 4 femmes? Et y aura-t-il un lien entre elle? Dis-moi tout sans trop m'en dire!
RépondreSupprimerAlors sans trop en dire, le roman est construit comme un roman choral dans lequel ses femmes se croisent sans être forcément intimes. Je suis heureuse de t'avoir intriguée, j'espère qu'il te plaira, les avis sont assez tranchés !
SupprimerSuper! J'adore les avis tranchées. On se fait sa propre idée, balançant d'un côté ou de l'autre!
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